Le haïku est un court poème, d'origine japonaise. Il doit donc, comme tout poème, faire partager des émotions
des sensations, des impressions.
"Du babil des hommes
semblent enfin soulagés
cerisiers au soir
Issa"
* Les 3 Avantages du Haïku * 1. Malgré ou, au contraire, grâce à sa brièveté, sa simplicité, le haïku peut transmettre de fortes émotions (notamment de par la richesse de ses images ou la force de sa suggestion).
2. C'est un regard, instantané, sans cesse renouvelé des petits riens de la vie de tous les jours et du monde qui nous entoure.
3. Les mots étant comptés, il doit être précis, montrer l'essentiel.
"Sous l'averseIl a la goutte au nezL'épouvantailIssa"* Un peu d'histoire *Les poètes japonais se regroupaient fréquemment pour des séances d’écriture. Ils écrivaient alors des suites de tanka, appelées renga (poèmes liés). Les plus célèbres, traduites en français, sont celles composées par Bashô et son école, des rengas de 36 versets intitulés kasen.
Le premier verset du renga, au rythme de 5, 7 et 5 onji, est appelé hokku. Dans un renga, les versets, qui par intermittence sont de 17 ou 14 syllabes, sont liés entre eux. Ainsi le wakiku, second verset de renku, vient compléter le hokku. Et le daisan, troisième verset, est lié au wakiku. Le hokku reste cependant autonome et, dans le Japon du XVI° siècle, des auteurs se sont spécialisés dans son écriture si bien que, progressivement, ce hokku devint un poème indépendant du renga. Il fut par la suite débaptisé pour devenir le haïkaï.
Cette initiative est attribuée à Bashô (1644-1694) reconnu par tous comme le père du haïku.
* Les Maîtres du Haïku *
* Bashô Matsuo (1644-1694) cherchait l’inspiration dans la nature créatrice.
Pour lui, le haïku était le point de jonction entre l’éphémère et l’éternel.
"Le pont suspendu
enroulés à nos vies
les lierres grimpants"
* Chigetsu-ni (1622-1708), disciple de Bashô, était considérée comme la meilleure femme poète du Shômon (l’école de Bashô).
"Le rossignol !
mes mains au-dessus de l’évier
s’interrompent"
* Buson Yosa (1716-1783) écrivait une poésie encore plus dépouillée.
Aucune réflexion ne transparaissait. L’image était là, brute de toute interprétation, mais ô combien importante.
"Aux poils de la chenille
on devine que souffle
la brise matinale"
* Issa Kobayashi (1763-1827), proche du haïkaï originel de l’école de Danrin, laissait libre cours à son imagination et a introduit l’humour, la dérision dans ses haïkus.
"La flopée de mouches
échappe à ses claques
ah ! cette main ridée"
* Shiki Masaoka (1867-1902), à l'origine du terme haïku qu'il a composé à partir des mots haïkaï et hokku, insistait sur le croquis d’après nature (shasei) et la description de ce qui est (ari no mama ni utsusu), concepts qu’il a découverts dans le réalisme pictural occidental.
"Je fixe un long moment
mon ombre
le cri des insectes"
* Hôsai Ozaki (1885-1926) a longtemps été attaché aux poètes de la Nouvelle Tendance (groupe fondé par son ami Seisensui) qui prônaient l'abandon des contraintes (métrique, kigo) au profit de la forme libre, et privilégiaient la transcription de l’instant.
"Solitude
j’écarte mes cinq doigts
histoire de voir"
* Kyoshi Takahama (1874-1959) préconisait de « chanter les fleurs et les oiseaux », c’est à dire d’admirer la nature et de dégager de toute scène les liens étroits qui existent entre l’être humain et la nature.
"Déjà je l’imagine
tombant sur mon cadavre –
la neige"
* Shûôshi Mizuhara (1892-1981) prônait un haïku traditionnel de forme mais moderniste dans ses thèmes et dans son esprit, c'est-à-dire qu’il pouvait être un pur produit de la mémoire et de l’imagination.
"Devant les chrysanthèmes
ma vie
fait silence"
Le haïku devient progressivement un art universel...
* La Structure du Haïku ** La Simplicité *Dire des choses simples avec des mots simples dans un style simple.
Ainsi se résume le haïku.
Il ne doit donc pas y avoir de mots superflus ou inutiles, d'emphases ou de métaphores; Il ne faut employer que peu d'adverbes, d'adjectifs, d'articles, de pronoms personnels ou de verbes; Les jeux de mots sont possibles, sans toutefois en abuser, et les rimes également.
Il faut être précis dans la concision, aller droit au but.
Le haïku doit être intuitif, à l'état brut, sans artifice intellectuel qui en compliquerait la compréhension.
"La Voie LactéeAppuyée d'un côtéSur la montagne.Shiki"* Nombre de syllabes et de lignes *Le haïku traditionnel est composé de 17 syllabes réparties en 3 lignes de 5, 7 puis 5 syllabes.
Cette composition est 'dictée' par la langue japonaise (élocution, métrique, absence d'articles, ...)
Transposer cette règle en d'autres langues n'est pas toujours aisé, aussi existe-t-il plusieurs conseils dans la communauté haïku.
"Dans un caniveauCourt par dessus le verglasL'eau de cuisson du riz.Issa"* La brièveté *Ce qui importe n'est pas tant le nombre de syllabes ou la composition court-long-court, mais le fait que le haïku puisse être lu à haute voix en un seul souffle.
"J'ai beau les secouerMes manches restentCouvertes de neige.Sôseki"Le haïku doit se suffire à lui-même.
Il ne doit pas être accompagné de longs commentaires ou descriptifs qui faciliteraient sa compréhension.
* Des images *Là encore tout n'est pas figé, et il existe plusieurs possibilités à 1, 2 ou 3 images ... sauf pour le haïku traditionnel.
Deux images est ce qu'il y a de plus fréquent :
La première situe le haïku dans le temps et l'espace, décrit un bref instant; La deuxième, et toute la force du haïku est là, montre un élément inattendu, insolite, étonnant, qui surprendra le lecteur.
"Je marche sur le gazonComme si je foulaisLes nuages.Bôsha"(à ne pas confondre avec Bashô)
* Une césure *Les deux images sont séparées d'une césure, ou d'un mot-pivot, pour éviter que le haïku ne soit qu'une seule et même phrase.
Cette césure, dite kireji, en référence au japonais qui dispose de mots spéciaux pour la matérialiser, doit intervenir en fin de première ou deuxième ligne (pas aux 2).
En français, elle peut être soit un signe de ponctuation situé en fin de ligne (si le haïkiste décide d'utiliser la ponctuation, ce qui n'est pas toujours le cas), soit un mot situé au milieu d'un vers (en général le deuxième), soit une coupure (non matérialisée) que le lecteur marquera naturellement (surtout à haute voix).
Cette césure permet également de dissocier les différentes images.
"Lune du soirIl s'est mis torse nuL'escargot.Issa"* Une saison *La haïku traditionnel oblige de situer le moment décrit dans le cours de l'année. C'est une manière de reconnaître la place toute relative de l'homme dans l'univers.
Pour cela, l'auteur cite directement la saison, ou la suggère, ou utilise un mot (un kigo) qui précise la période de l'année, ou un moment de la journée.
C'est tellement indispensable qu'il existe des recueils énumérant ces mots de saison en les agrémentant, ou non, d'exemples.
"Pas un endroitOù se mettreQuelle chaleur.Bokuya"
Et voila pour les haïkus, je pense que la fiche est suffisamment complète ^^.
Au passage une p'tite anecdote : Récemment la prof de français nous avait demandé une anthologie de poèmes (un recueil avec des poèmes à sélectionner quoi ^^) ainsi qu'une préface de notre cru.
Croyant bien faire, j'avais glissé un haïku japonais dans mon anthologie de poèmes et ben je peux vous dire que je l'ai senti passé ^^.
Les profs de français ne savent pas reconnaître la symbolique de ces poèmes ^^.